Tupiza, San Pablo de Lipez, Quetena Chico, la laguna Verde, la laguna Colorada, la laguna Honda, San Juan, le Salar d’Uyuni, Uyuni
J’avoue que je quitte Tupiza avec un peu d’appréhension, je m’engage pour 700/800 km de piste que je sais difficile, dans Los Lipez, sur des plateaux qui culminent entre 4 et 5000 m d’altitude.
La bonne nouvelle, c’est que j’ai pu bien préparer le parcours, j’ai pu glaner quelques bonnes infos pratiques, en discutant dans la rue, des habitants de Tupiza m’ont confirmé que la période était bonne car il ne fait pas « trop froid », je sais où il est possible de trouver des refuges, je suis bien équipé pour bivouaquer, j’ai également d‘excellentes traces gps pour la remontée vers le nord depuis la laguna Verde, donc c’est plutôt positif.
J’ai passé la journée d’hier à préparer le départ, faire quelques course et réorganiser mes mallettes, je me suis débarrassé de quelques affaires superflues, il me fallait gagner de la place, et du poids, pour pouvoir loger un peu de nourriture, donc tout va bien.
La piste s’élève très vite à la sortie de Tupiza, et offre rapidement de superbes points de vue, sous un grand ciel bleu.
Elle est assez cassée, beaucoup de tôle ondulée, donc le rythme n’est pas très élevé, mais je me suis fixé un objectif raisonnable, faire étape à San Pablo de Lipez, que j’estime à 120 km (En fait ce sera 160). Je retrouve confiance en roulant.
Je vais bientôt regretter la tôle ondulée, je rencontre maintenant des zones de « fesh fesh », dues au passage des véhicules, où je m‘enfonce et où il est difficile de garder le cap avec une moto chargée… Mais en y allant doucement, ça passe !
Un groupe de vigognes traverse la piste juste devant moi, c’est magnifique, plus loin ce sont, ce que j’imagine être des émeus que la moto effraie, pas le temps de sortir l’appareil photo …
La météo, s’est vite dégradée en fin de journée, un vent violent et glacial soulève parfois de tourbillons de poussière. Je suis content d’arriver à San Pablo de Lipez et d’avoir un toit pour la nuit, même si je sors le duvet, le bivouac aurait été une punition dans ces conditions.
Et au matin, surprise, il a neigé, le gars qui tient le refuge me dit que le col suivant risque d’être bloqué, mais en discutant avec un autre villageois, celui-ci pense qu’en fait il n’y a pas de neige en direction de Quetena Chico, et c’est vrai que les sommets dans cette direction ne sont pas du tout blanchis. Je décide donc d’aller voir par moi même, et effectivement à quelques kilomètres de San Pablo de Lipez, plus une trace de neige, mon aubergiste aurait il été tenté de me garder une nuit de plus ?
La piste alterne ensuite des portions rocailleuses plus roulantes et des portions avec des ornières de gravier, de « Ripio » comme on dit ici, où lorsque la fatigue se conjugue à un instant d’inattention, la sanction est immédiate. Ces chutes sont sans gravité car je ne roule pas vite dans ces portions, le plus dur est de relever la moto !
C’est d’ailleurs peut-être là, tant qu’on arrive à la relever sans la décharger, où l’on mesure si le chargement n’est pas trop important ?
Les derniers kilomètres sont un peu ardus avec des passages de gués larges et profonds qu’il faut aller reconnaître à pied avant de tenter le passage, je me remplis donc les chaussures d’eau bien fraîche, mais c’est la fin de journée 😉 et je ne suis pas loin de Quetena Chico.
La nuit et le froid tombent très vite, en arrivant au refuge, j’avais étendu mes affaires trempées à l’extérieur, une demi-heure après, elles sont déjà raidies par le gel.
Le lendemain, alors que je me préparais à partir, je me fais un ami Alpaga, celui-ci est d’abord venu quémander quelques caresses au gars qui tient le refuge et puis il est venu me voir pour se faire caresser, c’est un peu déconcertant parce qu’il te regarde en bougeant ses mâchoires horizontalement comme les dromadaires et là tu te dis : je vais avoir droit au fameux crachat, et bien non, adorable, tout doux et très affectueux !
Ma consommation d’essence est plus importante que prévu, je roule beaucoup sur des petits rapports dans du terrain meuble et la moto consomme. Par chance, l’ai pu acheter 3 litres d’essence, cela va me donner une petite marge de sécurité pour la suite.
Ce matin la piste repart en traversant des zones de lagunes ou paissent tranquillement des troupeaux de lamas, le paysage est superbe.
Je passe ensuite un massif montagneux, celui qui aurait du être enneigé… Surprise, il y a là un poste de contrôle pour prendre un ticket afin de visiter les villages abandonnés, je n’avais pas prévu de m’y attarder, mais pas moyen d’y échapper car le piste passe au milieu et donc visite « obligatoire » si l’on passe par là.
Avant d’arriver au refuge de la laguna Blanca, je rejoins un motard brésilien, qui lui file directement sur le Chili par le poste frontière de Hito Cajon, nous faisons quelques kilomètres ensembles, mais il me distance rapidement, je m’arrête trop souvent pour faire une photo !
Nuit très froide au refuge, la température tombe à -10 à l’extérieur, l’eau est coupée dans le refuge vers 21h afin d’éviter que les canalisations gèlent. Il y là quelques courageux qui vont se lever à 2h du matin pour tenter l’ascension du volcan Licancabur (5960 m) dans le froid et le vent. La vue que l’on doit avoir du sommet me tenterait bien, mais il faut que je garde mon énergie pour les jours à venir…
Chupete n’a pas du tout apprécié la nuit dehors, impossible de démarrer, l’huile est figée et la batterie à plat. Après l’avoir laissée se réchauffer 2 heures au soleil, toujours rien, un des gardes du poste de contrôle d’entrée du parc m’aide à la pousser et elle consent enfin à démarrer. Mais cela ne laisse rien présager de bon pour les jours à venir.
Juste en sortant des champs de geysers du sol de Manana, il y a un accident, à un croisement de piste, et pourtant la vue est dégagée et on ne peut pas dire que le trafic soit intense !
Un Toyota HDJ 80 d’agence a percuté une jeep du site de géothermie situé non loin au bout de la route, pas de blessés heureusement, les deux véhicules sont amochés, je fais le moto taxi en ramenant un des employés du site chercher un autre véhicule, puis je poursuis ma route vers la laguna Colorada.
Nuit toujours aussi froide, mais j’ai pu rentrer la moto dans le refuge, donc le lendemain avec la chaleur naturelle du soleil, vers 9h30 elle consent à démarrer toute seule, j’ai un peu affiné la technique, dès les premiers rayons de soleil, je positionne la moto afin qu’ils chauffent le dessus du réservoir où se trouve la batterie et le moteur côté embrayage pour réchauffer l’huile et apparemment ça aide !
A peine parti du refuge, je peine pour approcher de la laguna Colorada, le terrain est très meuble, je m’épuise, je couche la moto, j’ai fait trois kilomètres et je suis vidé.
Le demi tour s’impose, je sais par Freddy, un chauffeur d’agence, que la journée d’aujourd’hui ne sera pas facile, il y a beaucoup « d’arenas », de sable.
Je vais garder mon énergie pour la suite et rester sur un piste plus dure qui surplombe un peu la lagune, tout en offrant de jolis points de vue.
Au Campamiento Endo, au niveau de la sortie du parc, je peux acheter 5l d’essence dans une épicerie, voilà une réserve qui m’assure de rejoindre Uyuni sans problème.
Effectivement, il y a des passages très sablonneux dans le désert de Siloli, je ne regrette pas le demi-tour de ce matin car je mets pas mal de temps à les franchir pour arriver à l’Arbol de Piedra.
Mais je ne suis pas encore sorti du désert, je dois encore franchir une immense zone labourée d’ornières avant d’entamer une montée sablonneuse vers la passe qui marque la sortie du désert de Siloli. C’est tout à fait conforme à la description de Freddy, je sais donc à quoi m’attendre pour demain !
J’avais prévu d’aller bivouaquer à la Laguna Canapa, mais c’est trop loin pour ce soir, ce sera donc la laguna Honda (!), je ne l’ai pas fait exprès !
L’endroit se prête bien au bivouac, un peu en contrebas de la piste et légèrement abrité du vent. Malgré ce, il y a de bonnes rafales et le montage de la tente va s’avérer plus difficile que prévu, heureusement qu’il y a de gros blocs de pierres pour éviter que tout ne s’envole. j’ai positionné la moto pour qu’elle profite des premiers rayons demain matin.
Avant que le soleil ne se cache, il ne me reste plus qu’a me faire chauffer une succulente soupe déshydratée que je mange seul à l’abri de la tente.
Enfin seul, pas tout à fait, j’ai un compagnon de bivouac, merci Sonia de l’avoir glissé dans mes bagages 😉
Je vous présente Ovilio, il a bien supporté la nuit sans se plaindre malgré un bon -5 dans la tente au matin et un vent de folie, finalement, je n’étais pas si abrité que ça, heureusement qu’il y avait ces grosses pierres pour assurer la tente.
Les premiers rayons de soleil sont les bienvenus… et après m’être fait un café, je range le campement.
Je me fais violence, pour ne pas essayer de démarrer avant 9h30 afin de ne pas tirer sur la batterie, je vais me balader un peu et faire quelques photos des flamands plus bas dans la lagune.
Au retour, quelques coups de démarreur et ça démarre, yes !
Quelques kilomètres plus loin, je m’arrête au refuge de la laguna Hedondia, je me fais une pause au soleil, à l’abri du vent et je peux même avoir des œufs brouillés et un café, le luxe absolu !
La suite de la piste vers San Juan est un peu moins dure, il reste une passe très caillouteuse à franchir, puis je rejoins une excellente piste, Freddy m’avait dit une autoroute et il n’était pas loin de la vérité, qui permet de rejoindre le Salar de Chiguana, sa traversée est un avant goût de celui d’Uyuni, c’est super de rouler ainsi sur un billard.
Je fais étape à San Juan, un petit village situé au bord du salar et dont l’activité principale est la culture du quinoa, je n’en verrai pas sur pied, ce n’est pas la saison, tous les champs sont labourés.
L’arrivée sur le Salar est déconcertante, on se retrouve face à une immense étendue blanche, quelques traces plus marquées indiquent des passages plus fréquents,
Le GPS va me donner le cap de l’île aux cactus, la isla Incahuasi,
Un peu plus de 40km en ligne droite sur cette étendue immaculée pour rejoindre l’îlot, qui n’est d’ailleurs pas accessible pendant la saison des pluies.
En direction d’Uyuni ce sont environ 70km à parcourir sur l’étendue blanche dans la lumière du couchant, un rêve de motard…
Uyuni recèle un autre site qui m’intéresse tout particulièrement, un cimetière de trains, ce sont des d’anciennes machines à vapeur pour certaines partiellement démantelées, mais ce site à quelque chose d’attirant, sûrement un album photo dédié à ce site à suivre…
Au final, ces sept jours représentent plus de 900 km de piste relativement éprouvante, mais la beauté de ces endroits et le plaisir d’y rouler compensent largement les efforts fournis.
Je pense tout de même que je vais prendre la route asphaltée pour remonter vers Oruro et La Paz afin de récupérer un peu 😉
A bientôt
Christophe
Road-book
Voici le détail du parcours avec les kilométrages de chaque étape :
Jour 1 : Tupiza – San Pablo de Lipez – 161 km
Jour 2 : San Pablo de Lipez – Quetena Chico – 154 km
Jour 3 : Quetena Chico – Laguna Blanca – 115 km
Jour 4 : Laguna Blanca – Laguna Colorada – 107 km
Jour 5 : Laguna Colorada – Laguna Honda – 93 km
Jour 6 : Laguna Honda – San Juan – 122 km
Jour 7 : San Juan – Uyuni – 199 km
Merci à Jonathan, alidade.eu pour le partage d’informations qui m’ont grandement aidé dans la préparation de ce parcours dans le sud Lipez.
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